Ousmane Dia est un artiste dans toute l’acceptation du mot. Dans son atelier, c’est derrière ses toiles, ses sculptures, ses stéréos, ses plantes, de la rouille, de la fumée et sur un fond de musique Mballa que l’artiste se cache.
Un artiste de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Dakar et de l’Ecole supérieure d’Arts Visuels de Genève
Artiste plasticien, médiateur culturel et professeur, Ousmane Dia conduit avec brio ses multiples activités. Gai comme un pinson, le mélange entre le charisme et le talent s’avère être gagnant. Né en 1971 au Sénégal, Ousmane Dia se définit comme un citoyen du monde. Après avoir été reçu et salué dans le monde entier, à savoir au Sénégal, en France, aux Etats-Unis, en Italie, c’est à Genève que l’artiste est aujourd’hui installé et pratique son art.
Le déclic artistique débute dans sa ville natale, à Tambacounda dans le sud-est du Sénégal au côté de son mentor, l’artiste plasticien Jacob Yakouba. Après de longues heures d’observations et d’initiations, celui qui était appelé « le peintre de la femme » l’a poussé à exploiter son talent et l’a introduit dans le milieu artistique local. Toujours en suivant les conseils de son pygmalion, Ousmane Dia s’est inscrit à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Dakar en 1993. A la suite de cette formation, il a complété ses études avec un diplôme obtenu en 2001 en sculpture à l’Ecole supérieure d’Arts Visuels de Genève, ville où il réside toujours depuis.
La chaise
Au fil de sa carrière, Ousmane a développé une griffe bien particulière : la chaise. En effet, cette dernière est tournée en obsession et est omniprésente dans tous ses travaux. Qu’elle soit en signature, discrètement dissimulée sous un trait de pinceau sur une toile ou encore consacrée en une sculpture en fer sur plus de trois mètres, la chaise est partout. Car oui, la chaise nous parle et nous questionne. Elle nous invoque d’une part, le prestige, l’assise, le pouvoir ou la soumission mais aussi la bienvenue, l’accueil, et surtout, l’hospitalité à l’africaine. C’est toujours d’Afrique qu’il s’agit dans toutes ses œuvres. Car bien que résidant en Europe, ses racines sénégalaises sont toujours présentes.
Un artiste engagé
À l’occasion d’une exposition individuelle « Maturité » lui étant consacrée en 2018 à Dakar, l’artiste avait constitué 365 sculptures d’homme de fer, faisant écho à l’article 10 de la Constitution sénégalaise. Ces sculptures avaient été confectionnées dans son Tambacounda par des artisans locaux. Après une exposition à succès que tout le gratin du monde politico-culturel sénégalais a salué, Ousmane Dia fait don de ses sculptures à l’État du Sénégal. Ainsi, l’œuvre « La maturité de mon peuple », demeure aujourd’hui sur l’esplanade du Monument de la Renaissance à Dakar.
En plus d’être un artiste politiquement engagé, Ousmane Dia aborde des thèmes touchant à l’histoire, la tradition africaine, au désir, à la sexualité, aux traitements des animaux, à la violence sexuelle et pleins d’autres. Il s’agit d’un artiste transversal lorsqu’il en va de ses thèmes de prédilection mais aussi lorsqu’il en va de ses médiums.
Connu principalement pour ses sculptures monumentales, il a également un talent prononcé pour la fresque. Ces dernières grandes peintures ont été exposées à la Galerie iHofmann à Saint-Tropez, galerie qui représente essentiellement des artistes africains contemporains. La série exposée illustrait des tirailleur.e.s sénégalais.e.s de la première guerre mondiale. Encore une fois, c’est la façon de l’artiste de célébrer ces grands oubliés de l’Histoire.
De par ces thèmes qu’il aborde, Ousmane Dia en plus d’interroger toutes sortes de thèmes d’actualité, raconte l’histoire sénégalaise et rend hommage à son Sénégal natal. Son art étant constamment en mouvement, il réussit à mettre le doigt sur des problématiques méconnues de beaucoup. Car oui, artiste dans toute sa splendeur, il a pour ambition de pallier avec son talent à la rigidité de l’histoire de l’art africain et de l’histoire africaine en général. Son travail étant compris et ressenti avec une grande intensité par quiconque a l’occasion de le découvrir, il sait saisir par sa force et son universalité.
Laura Dabo