Retour sur notre Coup de Cœur avec le photographe malien John Moussa Kalapo

Il est l’un des artistes photographes maliens parmi les plus talentueux de la nouvelle génération. Pour celles et ceux qui doutaient encore de son travail, les années ne font que confirmer son talent. Car il est de ceux qui documentent au quotidien ce que bon nombre de personnes refusent de voir par choix, par peur ou parfois par obligation rang social oblige.

Coup de cœur.


John Moussa Kalapo

Asakan : Pour commencer notre entretien, voulez-vous vous présenter ?

John Moussa KALAPO : Je m’appelle John Moussa Kalapo. J’ai étudié la photographie conceptuelle-créative et d’art au centre de formation professionnel en photographie (CFP) de Bamako. En 2015, je suis parti poursuivre une formation en photographie documentaire et résidence de création dans l’une des prestigieuses écoles d’art photographique Market Photo Workshop (MPW) à Johannesburg suite à une bourse de la Tierney Family Foundation Awards -Tierney Fellowship.

Aujourd’hui, j’effectue des voyages de reportage photos de plusieurs ONG telles que : Swisscontact, One Word, Spana UK, Water-Aid, CTA- agricole, Union Européenne, PAECIS, Caritas-Suisse, Osiwa, Fres-Energie Rural. Je fais aussi des reportages pour des sociétés telles que : Safran-France, la société Jumbo-Mali, Sama Transport Mali/Côte d’ivoire, Eagles EYE. Je suis sollicité par des agences de presse comme : AFP, EPA, GETTY, et Reuters. J’ai participé également à des ateliers photos et des expositions collectives au Mali, Afrique, et en France. J’ai aussi travaillé sur le projet des archives de la photographie malienne pour la conservation, la numérisation et l’archivage de l’héritage de célèbres photographes africains comme Malick SIDIBE, Abderrahmane SAKALY, Tijane SITOU, Adama KOUYATE, Mamadou CISSE et Félix DIALLO (http://amp.matrix.msu.edu /facebook.com/ArchiveOfMalianPhotography).


Asakan : Quelle définition faites-vous de l’art ? Et comment percevez-vous l’art contemporain ?

John Moussa KALAPO : L’Art, c’est la façon dont tu vois la réalité qui t’entoure dans la société, les objets, les éléments de la nature, le paysage, n’importe quoi. Cela peut être beau ou non, tel est dans ton regard. De même, ce que voit l’artiste n’est pas tout à fait le même que ce que voit le citoyen lambda. L’art contemporain rassemble les pratiques et les réalisations esthétiques qui véhiculent des idées ou des concepts qui transgressent les frontières entre l’art et ce qui traditionnellement n’était pas considéré comme de l’art.


Asakan : Quand avez-vous su que vous consacreriez votre vie à l’art ?

John Moussa KALAPO : Déjà tout petit, je jouais avec l’appareil photo polaroid de mon père. Plus tard, après mes études de comptabilité, je me suis lancé dans la vidéo avec des amis en réalisant des clips et des documentaires. Par la suite, j’ai décidé de me consacrer exclusivement à la photographie qui a toujours été ma plus grande passion. Avec elle, je trouvais beaucoup plus de facilités à dénoncer, sensibiliser et partager les histoires de ma communauté grâce à ma sensibilité. C’est ainsi que l’art s’est ainsi imposé dans ma vie.


Asakan : En tant qu’artiste, comment vous définiriez-vous ? Comment êtes-vous parvenu à la finalisation de votre empreinte ?

John Moussa KALAPO : La photographie est pour moi un moyen de communiquer en véhiculant les problèmes du quotidien de la société, transmettre une vision. Un artiste doit avoir le réflexe de s’arrêter, d’observer et se demander pourquoi les choses sont toujours vues d’une certaine manière alors qu’elles peuvent être racontées d’une autre façon. C’est pourquoi j’immortalise les empreintes sociales, je rends visible l’invisible.


John Kalapo, L’exclusion de la cérémonie, série D’Autres Mondes. Photographie.

Asakan : Quelles émotions vous stimulent ? Quelle est l’œuvre phare de votre création ?

John Moussa KALAPO : L’art est une expérience qui agit à plusieurs niveaux. En plus de stimuler les émotions et la motricité, le contact avec la beauté, avec l’ouverture au monde qu’elle offre, il restaure la confiance en soi. J’éprouve beaucoup de plaisir à me glisser dans la peau de personnages et comprendre leurs fragments de vie.

La série documentaire « D’Autres Mondes » exposée entre l’Afrique du Sud, le Cameroun et le Mali est l’une de mes œuvres phares. J’y raconte particulièrement l’histoire de Saba, ce jeune Malien diplômé sans emploi qui a préféré à l’émigration en Europe, rester sur place et se battre envers et contre tous pour finir par réussir sa vie et faire la fierté de tout un monde. 

John Kalapo, Identités, série D’Autres Mondes. Photographie.
John Kalapo, Les angoisses et souffrances, série D’Autres Mondes. Photographie.
John Kalapo, Mon gagne-pain, série D’Autres Mondes. Photographie.

Plus que jamais en effet, le monde est confronté à la migration de ressortissants africains vers « d’autres mondes », la série documentaire « D’Autres Mondes » ainsi que le livre qui a été imprimé à cette occasion portent un certain nombre d’attentes auto-imposées et d’aspirations que j’ai voulu fixer en retraçant le parcours de Saba dans son ambition de réussir sa vie et d’être reconnu par sa société sans pour autant bouger de Bamako.


Asakan : Quel est le regard porté sur votre travail par le public ? Par le milieu artistique ?

John Moussa KALAPO : C’est le spectateur qui fait l’artiste par son jugement critique mais aussi, la publicité de l’œuvre. Le public, mes proches et le milieu artistique, beaucoup me suivent, critiquent et admirent ce que je fais comme travail photographique. Je suis également sollicité pour des résidences, expositions et autres à travers lesquelles je partage ma petite expérience. 

Enfin, il faut dire que j’ai remporté plusieurs prestigieux prix dont les Prix concours photos « En quoi l’Afrique est différente ? » du portail d’informations www.afriquinfos.com  et le Prix de la meilleure vente d’images sur Gettyimages (par le Centre de formation de photographie de Bamako) en 2011. 

Je suis aussi lauréat du 2ème Prix de l’innovation à la 3ème édition de la Quinzaine de la photographie au Bénin, du Prix Tierney Family Foundation -Bamako Awards en collaboration avec Market Photo workshop en 2015, représentant de mon pays le Mali en photographie aux 8èmes Jeux de la Francophonie à Abidjan en 2016, 2ème prix du concours photos Wiki-loves Africa à la Foires à Manuscrits de Bamako en 2017 et 2018 et, entre autres, 3ème prix du festival de la photographie de l’inter-biennale du Mali en 2018. 


Pour plus d’informations sur le travail de John Moussa Kalapo, rendez-vous sur :

Propos recueillis par : Olaréwadjou Elvis LALEYE.

Article publié pour la première fois sur le Facebook d’Asakan en décembre 2020.

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