Ce 13 mai 2025, le Bénin a solennellement accueilli dans son patrimoine, le Kataklè, un siège royal cérémoniel issu du patrimoine du Royaume du Danxomè. Cette restitution s’inscrit dans la dynamique de récupération des biens culturels béninois qui sont illégalement détenus dans les institutions muséales occidentales.

Le Kataklè est un siège en forme basse à trois pieds trapus utilisé lors des rituels de couronnement. Il symbolisait dans le Royaume du Danxomè, actuellement correspondant à la ville Abomey et ses environs immédiats, la stabilité, le pouvoir et l’unité. Il s’agit du premier siège utilisé pour introniser un roi. Fabriqué en bois massif, il incarne à la fois l’élégance, la sobriété et la modernité des expressions artistiques traditionnelles.

lors de la cérémonie de réception officielle à la Présidence de la République du Bénin
133 ans d’un long parcours
En 1892, au cours de la campagne coloniale française dirigée par le colonel Alfred Dodds, plusieurs objets furent pillés du palais royal du Danxomè. Le Kataklè figure parmi les 27 pièces transférées à Paris au Musée d’Ethnographie du Trocadéro, devenu plus tard le Musée de l’Homme.
En 1939, dans le cadre d’un échange muséographique entre la France et la Finlande, il est intégré aux collections du Musée national finois parmi un lot d’objets provenant d’Afrique, d’Asie et d’Océanie. La pratique serait courante à l’époque pour s’entre-enrichir entre des collections de divers pays.
Mais, à Helsinki, le siège ne sera jamais exposé et atterrit plutôt dans les réserves du Musée national, le Kansallismuseo, où il va rester durant de nombreuses années. Jusqu’à ce que l’historienne de l’art et présidente de la Fondation Zinsou, Marie-Cécile Zinsou et la conservatrice Pilvi Vainonen le retrouvent et alertent.
Radié des inventaires français en août 2024, le Kataklè fait alors l’objet d’un accord bilatéral entre le Bénin et la Finlande en novembre de la même année, lors d’une visite officielle d’Olushegun Adjadi Bakari, ministre béninois des affaires étrangères à Helsinki. Une lettre de son homologue du Tourisme, de la Culture et des Arts, Jean-Michel Abimbola, adressée en décembre à son homologue finlandaise, Mari-Leena Talvitie, permet ensuite de mener les travaux techniques entre janvier et avril 2025. Ce qui a débouché, 133 ans après, sur le retour sur la terre d’origine du Kataklè.
La cérémonie solennelle de transfert de propriété par la Finlande au Bénin s’est tenue dans l’enceinte de la Présidence de la République du Bénin, en présence des différents ministres susmentionnés et d’un parterre de distingués invités. Au terme de cette cérémonie, les trois Ministres accompagnées de leurs différentes équipes techniques ont été reçus en audience par Son Excellence, Patrice Talon, Président du Bénin qui n’a pas manqué de se féliciter de l’aboutissement de cette restitution qui traduit la vitalité des relations de coopération entre les deux pays.
Une restitution qui enrichit l’histoire nationale du Bénin
On se souvient de la fameuse phrase du ministre béninois de la culture, Jean-Michel Abimbola, le 10 novembre 2021, lors du retour des 26 objets restitués par la France : « Les œuvres sont parties d’un royaume, elles reviennent dans une république, pour la nation béninoise. Qu’on soit du nord ou du sud, de l’est et de l’ouest, c’est un patrimoine commun et ce patrimoine va cimenter la fierté béninoise ». Après sa restitution officielle, le Kataklè a, en effet, été intégré à la collection nationale et confié au soin du conservateur du musée d’Abomey où est en train d’être érigé le Musée des Rois et Amazones du Danxomè (MuRAD), destination finale de tous les Trésors royaux restitués.
C’est un tournant symbolique pour le Bénin qui conforte ainsi la démarche entreprise depuis 2016 de réaffirmer le droit des peuples à se réapproprier leur histoire et à réinscrire dans leur quotidien les témoins matériels de leur mémoire.
En ce sens, le retour du Kataklè ouvre la voie à de nouvelles initiatives éducatives, muséales et scientifiques. Il permettra d’enrichir les contenus de médiation culturelle au niveau du futur musée d’Abomey et de renforcer la transmission de l’histoire du Bénin aux jeunes générations.
Ce retour constitue également une opportunité pour stimuler la recherche académique sur les contextes historiques et artistiques des objets royaux, tout en renforçant la sensibilisation à la préservation du patrimoine. Par son caractère symbolique, il invite à un dialogue international renouvelé autour de la reconnaissance des héritages culturels et de leur place dans les récits contemporains des nations.
Il est à souhaiter que ces restitutions se poursuivent afin que l’identité des peuples et la dignité des nations, hier colonisées, soient enfin respectées.
La Rédaction.